Dans les classiques de la littérature troll la fable de la cigale et de la fourmi est assez prisée par ceux qui ne doutent de rien.
Histoire classique : la fourmi travaille toute la journée, des heures durant, tout l'été et accumule de la nourriture dans son nid.
Pendant ce temps la cigale ne fait rien et passe son temps à s'amuser.
Et puis l'hiver arrive, la cigale commence à avoir faim et jusque là on est dans la fable d'origine.
Elle se met alors (c'est là qu'on arrive dans le comique) à gémir, alerter les médias sur son sort pour jeter l'opprobe sur cette fourmi égoïste qui ne veut pas partager. Et tout y passe, les syndicats, les journaux de gauche, enfin tout ce qu'on peut trouver comme acteur de la politique sociale. La cigale va finir par s'approprier le fruit du travail de la fourmi qui va émigrer en Suisse (on n'a peur de rien chez les fabulistes pro-medef).
Pourquoi pas ? Mais bon ! Il y a quand-même de menus détails à prendre en compte et à rappeler pour coller à la réalité. Oh, trois fois rien.
En fait, effectivement, la fourmi travaille bien tout l'été et même davantage parce qu'on est courageux chez les fourmis et qu'on a la passion du travail bien fait. On met du coeur à l'ouvrage et on est fier de ce qu'on réalise. Faut-il vraiment s'attarder sur ces détails ? Bah, si on a du temps à perdre, allons y alors.
Le premier c'est que toute cette nourriture amassée par cette fourmi ne lui appartient pas mais vient du domaine de la cigale. Vous avez remarqué que la cigale est bien plus grosse que la fourmi et n'a pas perdu de temps avant de la soumettre pour la mettre au travail. Elle a bien promis de lui laisser un peu de nourriture mais les promesses, vous savez ce que ça vaut. Et notre cigale de se livrer aux mondanités dans le monde des cigales, elle assiste à des courses de crickets, joue de la musique.
Là-dessus l'automne arrive, les feuilles tombent, les fleurs se fanent, les fruits tombés achèvent de pourrir. La cigale rassemble les fourmis et leur tient ce discours :
les ressources naturelles se raréfient, c'est la crise ! Il va falloir procéder à des réajustements structurels et adopter une thérapie de choc.
Il ne reste plus rien pour vous rétribuer, la concurrence des autres fourmillières a été féroce ces derniers temps. Et c'est le coeur serré et dans l'honneur que je vous annonce que je vais devoir me séparer de vous ! Toutes les solutions imaginables ayant été étudiées, j'ai le regret de vous dire que même s'il m'en coûte beaucoup, je ne peux pas faire autrement.
Fin de l'histoire (c'est le meilleur) :
les fourmis* qui ont le nombre pour elles, se précipitent sur la cigale, la découpent et en emportent les morceaux vers le nid pour rejoindre les victuailles accumulées.
MORALITE :
La différence entre cette fable et celle des larbins du medef vient d'un tout petit détail, tellement insignifiant dans cette histoire que La Fontaine a négligé de le mentionner. Il tient à un misérable morceau de papier détenu par la cigale et qui s'appelle Titre de propriété.
Les protagonistes de cette histoire sont maintenant tous dans le nid et ce petit moceau de papier dérisoire laissé à l'abandon reçoit les gouttes de pluie qui en emportent l'encre qui s'écoule comme du rimmel sur la joue d'une jeune fille qui pleure.
Et me direz-vous qu'en est-il pour les fourmis qui n'auraient pas osé s'attaquer à la cigale ? Et là je laisserai la parole à Confucius qui a dit :
l’index rugueux de la "main invisible du marché" reste douloureusement fiché dans l’anus de l’homo servilis qui reste coi.
*c'était des fourmis rouges